Jeudi 15 Août - Fête de l'Assomption — Notre-Dame d'Auteuil

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Jeudi 15 Août - Fête de l'Assomption

Homélie de l’Assomption 2024

Cette fête m’inspire deux réflexions qu’en ce jour de fête je souhaite vous partagez.

La première est une contemplation : l’Evangile de saint Marc et celui de saint Matthieu livrent parfois d’une certaine extériorité dans les relations entre Jésus et Marie. Marie parait extérieure à la mission de son fils, jouant un rôle un peu instrumental. Nous ne voyons pas Marie recevoir l’annonce de l’ange, ni méditer les évènements dans son cœur, elle n’intervient pas à Cana, ni ne se tient au pied de la croix. Jésus semble même la reléguer en questionnant ceux qui l’avertissent qu’elle l’attend dehors, alors qu’il enseigne, de la manière suivante : « Qui est ma mère, mes frères, mes sœurs ? ». J’ai eu l’occasion de lire une bande dessinée chrétienne il y a quelques années, de facture protestante, et c’était sous ce biais qu’on représentait Marie. Une femme certainement généreuse, malheureusement trop peu fine ou perçante pour pouvoir prétendre à la dignité que lui reconnaît l’Eglise catholique. Elle apparait comme une protagoniste que les évènements dépassent et qui se trouvent toujours à la traine. A l’inverse saint Jean et saint Luc nous laissent entrevoir une présence de Marie beaucoup importante, souvent suggérée et nous amenant à comprendre que les liens familiaux se croisent avec ceux de la disciple avec son maître. Marie n’est ni la jeune ingénue, ni la matrone méditerranéenne des caricatures, mais la femme qui pénètre d’une manière particulière la suite du Christ. Ce n’est pas une question de compréhension spéculative, mais de saisie de la réalité, certainement renforcée par les nombreuses années qui ont précédé le début du ministère public. Marie avait un accès complet, affectif et croyant au mystère de l’Incarnation, puis de la Rédemption. Comme nous l’avons certainement expérimenté, cette saisie de la relation du Christ à sa mère n’est pas le seul fruit d’une lecture cursive des évangiles ou des conciles, même si celle-ci se révèle nécessaire. Elle se développe dans la méditation lente et attentive des scènes de l’Evangile, une Bible sur les genoux, ou un chapelet à la main. Certaines vérités de la foi catholique s’éprouvent quand nous croisons l’enseignement reçu avec cette part de contemplation que nous déployons dans la prière. J’imagine personnellement une sorte d’intelligence réciproque entre Marie et Jésus, développée dans la vie quotidienne, où l’un comprend l’autre sans parler, où les yeux échangent la saisie du quotidien, et la conscience d’une œuvre divine à accomplir. La contemplation à laquelle je vous invite est de saisir ce lien particulier qui unit la mère et le fils, depuis la conception jusqu’au-delà de la résurrection. L’Eglise a développé par cette contemplation la saisie de la vie cachée et affectueuse du Christ avec sa mère. Elle a pu saisir ce que la fine épaisseur des lettres saintes suggérait, et croyant que l’Esprit Saint éclaire ce que le temps recouvre d’un voile d’oubli, elle a eu confiance en son assistance pour comprendre dans l’esprit qui habitait la lettre. Le magnifique passage de la première épître aux Corinthiens nous fait prendre conscience de la victoire du Christ sur la mort, et le renouvèlement du sens de la vie nouvelle, non plus comme nous l’avons reçu du premier Adam, mais comme nous le recevons du Christ. L’Eglise a sondé sa propre prière, sa propre liturgie, développée sur des siècles et a cru que la Vierge Marie était associée d’une manière particulière à cette victoire. L’Assomption est un effet du règne du Christ qui affecte sa mère, qui, à l’ultime moment où les hommes expirent, elle reçoit dans son corps et dans son âme le souffle vivificateur de l’Esprit Saint. A-t-elle échappé immédiatement aux regards des Apôtres assemblés autour d’elle ? A-t ’elle connu une ascension visible ? Il est très difficile de se prononcer. 

La seconde réflexion que je vous propose sera beaucoup plus courte. L’Assomption est un basculement. J’entends parfois parler de la peur de l’engagement. J’observe un « conservatisme » qui n’est ni moral, ni religieux, dans une foule de domaines. J’ai été frappé de constater que dans beaucoup de séries télévisées, les personnages n’évoluent que très peu, et la trame sous-jacente à leurs enquêtes, souvent répétitives, n’est qu’une actualisation de leur passé. On sent bien que la production hésite à altérer la stabilité du personnage. S’il disparait, c’est parce que l’acteur qui le jouait a rompu son contrat. Malgré cela, ils ne changent que très peu, et restent figés dans leur vie. Il manifeste que la crainte de l’engagement devient une crainte du changement profond, qu’implique la foi, l’amour, l’espérance, et la répulsion de se voir altérer. A l’inverse l’Assomption de la Vierge achève un changement radical en elle. La vie éternelle ne fait pas peur à cause de sa longueur, ou de ce qui se passe après la mort, mais à cause de ce changement radical qu’elle opère en nous. L’Assomption exprime ce changement radical, du corps mortel et caduque, au corps glorieux, d’une vie dans la chair à une vie dans l’Esprit Saint. La fête de l’Assomption marque la réalité du basculement, de l’entrée dans une existence qui nous dépasse, et non plus dans une existence à notre seule mesure.

Deux réflexions simples, pour cette fête qui nous tient tant à cœur et l’occasion de nous rapprocher plus de la Vierge Marie et de l’Eglise.

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